
Paris sans voitures : quels effets sur la qualité de l’air ?
Cauchemar pour certains, véritable libération pour d’autres : dimanche 27 septembre 2015 a eu lieu à Paris, de 11h à 18h, la journée sans voitures. Quels ont été les effets réels de cette opération sur la qualité de l’air dans la capitale? L’équipe scientifique de Plume Labs vous livre ses conclusions.
Lors de cette journée, les Parisiens ont pu profiter du calme des rues et flâner à pied ou à vélo dans plusieurs quartiers comme le centre, les Champs-Élysées, les alentours de la Tour Eiffel ou encore les bois de Boulogne et de Vincennes. En dehors de ces zones, la circulation automobile était autorisée mais limitée à 20 km/h.
Pour Plume Labs, cette journée a été l’occasion d’étudier l’impact d’une telle initiative sur les niveaux de polluants mesurés via notre indice de qualité de l’air, le Plume Index. Adaptée des recommandations de l’Organisation Mondiale de la Santé, l’échelle du Plume Index a été conçue pour restituer le plus fidèlement possible l’exposition des citadins à la pollution.
Lors de la journée sans voitures, nous avons analysé l’évolution du Plume Index sur 6 stations : 2 situées dans des zones fermées à la circulation (Champs-Elysées, Quai des Célestins) et 4 dans des zones autorisées (La Défense, le 15e, Pantin, Boulevard Périphérique Est). Pour chaque station, nous avons étudié l’évolution des différents polluants au cours de la journée et comparé le Plume Index aux valeurs enregistrées pour un dimanche habituel et pour un dimanche “propre”.
Ci-dessous, le premier graphique présente les données recueillies pour l’Avenue des Champs-Elysées, rendue aux piétons et autres adeptes des moyens de transport propres le temps d’une journée.
Du côté des Champs-Elysées, la journée s’annonçait normale : jusqu’à 8h du matin, le Plume Index est proche de la valeur moyenne pour un dimanche, avec un pic de NO2 vers 6h, peut-être dû à l’installation des barrages et drapeaux. A partir de 8h, le Plume Index indique que l’air devient pur et le promeneur parisien respire mieux. L’indice remonte ensuite légérement à cause des PM10 (particules fines de diamètre inférieur à 10 micromètres), tout en restant bien en-dessous du niveau moyen pour un dimanche. A 18h, les véhicules motorisés reprennent progressivement possession des Champs-Elysées, et le taux de NO2 redécolle.
Regardons maintenant ce qu’il s’est passé du côté du Quai des Célestins, dans le 4e arrondissement, une zone fermée à la circulation lors de l’opération :
Cette fois-ci, le Plume Index est proche des valeurs les plus basses dès les premières heures de la journée. Le taux de NO2 atteint même des niveaux historiquement bas. En revanche, de 11h à 18h donc durant la période sans voitures, le niveau de pollution remonte progressivement. Comment est-ce possible? Le polluant responsable de ce résultat surprenant n’est autre que l’ozone (O3), polluant secondaire qui se forme lorsque d’autres polluants (primaires) réagissent dans l’atmosphère. Ainsi, la formation d’ozone résulte notamment de la destruction par le soleil du…NO2 ! D’autres gaz, regroupés sous le joli nom de composés organiques volatils (COV) et émis par les activités humaines ou par les plantes, se forment aussi de cette manière.
Analysons maintenant la qualité de l’air dans les zones autorisées à la circulation. Les 4 stations choisies sont : la Défense à l’ouest, Pantin au nord, le boulevard périphérique à l’est et Paris XVe au sud. Mis à part la Défense, la qualité de l’air mesurée sur ces stations est proche de celle enregistrée en moyenne pour un dimanche. On note tout de même un pic de NO2 sur le périphérique à l’est de Paris, qu’il est difficile d’attribuer à un report du trafic intra-muros sans données supplémentaires, ainsi que des niveaux inférieurs à la moyenne à Pantin.
En conclusion, les données recueillies à Paris lors de la journée sans voitures montrent une amélioration de la qualité de l’air, qui reste toutefois à nuancer en raison des polluants secondaires. En revanche, l’impact de cette opération sur la pollution auditive est indiscutable : Bruitparif, l’observatoire du bruit en Île-de-France, a relevé des niveaux de bruit divisés par deux dans le centre de Paris. Par ailleurs, le service de vélos partagés Vélib’ a connu un record historique de locations avec près de 2 Vélib’ loués par seconde. Face au succès de cette journée, la Maire de Paris a assuré qu’elle renouvellerait l’opération et a même suggérer d’en augmenter la fréquence. A Bordeaux, les citadins s’offrent déjà un bol d’air frais mensuel en fermant le centre-ville aux véhicules motorisés le premier dimanche de chaque mois. Plutôt encourageant, n’est-ce pas ?
Plus d’informations sur la Journée sans voitures à Paris ici.